Depuis plusieurs semaines un nouveau thème de réflexion émerge à l’Institut Kervégan, il s’agit des « Migrants ». Pour celles et ceux qui suivent nos travaux, ce sujet n’est pas nouveau puisque déjà en 2009, il fût l’objet d’un groupe de réflexion et surtout d’un ouvrage intitulé : « Migrants, quelle place pour la diversité à Nantes ».
Il était question à l’époque de montrer que ce sujet devait être appréhendé comme un élément important dans l’organisation de notre vie sociale quotidienne. Il devait être éclairé afin d’établir les faits et vérités au delà des fantasmes et caricatures qu’il suscitait. A la relecture de cet ouvrage, un constat est saisissant, le traitement du sujet des migrants est encore très juste, la méthode et le cadrage de la réflexion similaires aux souhaits des membres actuels de l’IK de s’en saisir. Pour exemple, le propos introductif écrit dans cet ouvrage par Hélène Combe, se fait très clairement le reflet des problématiques et enjeux actuels du phénomène migratoire :
« Selon l’engagement des Cités et Gouvernements Locaux Unis, « la diversité culturelle est le premier patrimoine de l’humanité ».
Mais que savons-nous en faire ? Aussi loin que remonte l’histoire de l’humanité, les migrations, c’est à-dire les déplacements de populations d’un endroit à un autre, puis d’une région ou d’un pays à une autre, sont un fait établi.
Ces mobilités, contraintes ou choisies, ont peu à peu façonné des peuples et des cultures différents, un fil les reliant tous : leur origine d’homo sapiens.
Si la rencontre avec l’autre « différent » a indéniablement apporté des richesses à la France, du point de vue économique et culturel, elle n’a cependant jamais été totalement perçue comme « allant de soi » et ce, encore moins depuis l’époque où le chômage a amené les Français à considérer les étrangers comme des « concurrents » (que ce soit sur notre sol ou à distance en raison de la délocalisation de certaines activités économiques).
Non seulement « concurrents » vis-à-vis du marché de l’emploi, les migrants aujourd’hui, peuvent être perçus comme menaçant les valeurs communément partagées par la société française : les pratiques religieuses, les structures familiales, les rapports sociaux de populations issues d’autres continents peuvent heurter le modèle républicain laïc. Et les incompréhensions se multiplient d’autant plus qu’on connaît mal, et donc que l’on fantasme, la culture de l’autre.
La patrie des Droits de l’Homme, dont l’exigence humaniste et démocratique a rayonné jusque dans les années 90 à travers le monde, comme un appel à la solidarité et à la responsabilité collective, pourrait-elle perdre en esprit de cohésion ?
Quelles clefs pouvons-nous inventer ensemble, Français et étrangers, pour trouver une meilleure « harmonie humaine » ici et dans le rapport aux populations plus lointaines, pour que le terme « fraternité » inscrit dans notre Constitution reprenne « droit de cité » ?
Considérant que la question des migrations est au cœur de l’évolution de notre société, et que l’intelligence collective est la seule hypothèse crédible pour trouver des solutions aux problèmes actuels posés, l’Institut Kervégan suggère de débattre et d’explorer de nouvelles voies.
Le travail engagé sur ce terrain au printemps 2008 prend une acuité particulière à l’heure de la publication du présent cahier, puisque la situation de crises structurelles (économiques, écologiques, sociales et démocratiques) à laquelle nous devons faire face à l’échelle mondiale, nationale et locale risque de renforcer, au niveau individuel et collectif, les réflexes communautaires et la recherche de solutions autocentrées au sein des territoires.
Démystifier un sujet emprunt de fantasme
Un travail nouveau de l’Institut Kervégan sur le phénomène migratoire ne peut ignorer ce document et, au contraire, s’y appuyer et proposer une avancée supplémentaire : Qu’est ce qui a changé depuis 2009 ?
L’actualité récente à travers notamment les résultats du Rassemblement National aux élections européennes puis aux législatives montrent que depuis de nombreuses années les problématiques liées au phénomène migratoire n’ont fait que de s’accroitre. Les risques étaient déjà là en 2009, annoncés, les solutions et les actions à mener partiellement mises en œuvre. De plus, les crises géopolitiques (guerre en Syrie, Irak, Afghanistan, crise économique, réchauffement climatique…) n’ont fait qu’aggraver une situation déjà problématique.
Une réflexion pragmatique au delà des clivages politiques
Il est donc utile au regard de ces éléments de donner un nouvel éclairage à ce qu’on appelle la crise migratoire qui cristallise une grande part des fantasmes et des clivages actuels en France et en Europe.
L’objet de la réflexion sera dans un premier temps d’exposer les problématiques avec des éléments de contexte fiables, notamment concernant les demandeurs d’asiles et les réfugiés à l’aide de chiffres afin de déconstruire les mythes. Il s’agit de comprendre de quoi on parle : Qu’est-ce qu’un migrant ? Un demandeur d’asile ? Un réfugié ? Quels sont leurs droits ? Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Quels sont leurs parcours ? Pourquoi la France et la Loire Atlantique ? Combien sont-ils vraiment ? Comment s’intègrent-ils ?
Trouver des leviers d’actions pour améliorer une situation complexe aux enjeux multiples
Puis étudier comment, sur notre territoire, il est possible de rendre plus efficient le phénomène migratoire inscrit dans notre histoire et dans notre futur aux regards de nos principes fondamentaux d’universalisme et de droit d’asile mais aussi économique, de cohésion sociale et de sécurité publique…
Un cycle de conférences réunissant les principaux acteurs et experts du sujet sur le territoire est en préparation à partir d’octobre 2024.
A bientôt pour la suite…