Notre Tribune de Janvier 2015 sortie après les attentats de Charlie Hebdo traduisait notre émotion et notre rejet du fanatisme, mais aussi la nécessité, après la phase de recueillement, de passer à la prise de décision et au courage. De nouveau les actes barbares du 13 Novembre nous ont agressés dans nos convictions et nos valeurs, mais aussi nous amènent à réfléchir à notre vision du monde démocratique.
Si comme l’a affirmé le Président de la République, « La liberté ne demande pas à être vengée, mais servie », nous ne pouvons plus nier que nous sommes en guerre. Notre république doit résister. On ne peut pas se contenter d’une unité nationale de façade, et se complaire dans l’incantation de nos valeurs républicaines.
Résister à l’extérieur
Sur les théâtres extérieurs, nous ne devrons intervenir qu’au sein d’une alliance de tous les pays qui défendent les mêmes valeurs démocratiques de liberté. On ne peut d’ailleurs que regretter la frilosité des pays européens, à part l’Allemagne, qui «traînent les pieds» pour s’engager franchement dans ce combat. Améliorer la coopération européenne en matière de renseignements en changeant une forme d’État d’esprit de méfiance entre états est indispensable. Il est probable que les nécessités de vaincre le terrorisme nous amèneront à collaborer sur place avec des gouvernements qui ne partagent ni nos valeurs, ni notre conception de la démocratie. Le pragmatisme devra l’emporter.
Résister à l’intérieur
Sans opérer un virage ultra sécuritaire nos moyens d’intervention en matière de sécurité (policières, judiciaires, militaires) devront être renforcés. Il est surprenant que la France, dont les dépenses publiques sont supérieures de 8 % de PIB à la moyenne des pays de la Zone Euro, affiche un budget «Sécurité et Justice» nettement inférieur à la moyenne européenne.
Un point crucial reste à régler, celui de la révolte d’une partie de notre jeunesse. Daech utilise contre nous de jeunes Français radicalisés. Ils ne veulent ni la culture de leurs parents musulmans, ni la culture occidentale. Ils ne s’intéressent pas à la théologie, et adhèrent à une forme d’Islam (salafiste) qui convient à leur besoin de rupture générationnelle, culturelle, politique. Ils sont attirés par la radicalité et recherchent une cause qui épouse leur révolte personnelle. Un spécialiste de l’Islam parle à leur sujet de «l’Islamisation de la radicalité !» Comment réinsérer ces «enfants perdus» ?
Résister contre nos vieux démons
Arrêter la critique et le dénigrement systématique qui minent notre démocratie, mais aussi le contentement de soi et notre côté «donneur de leçons» qui frise l’arrogance.
Cette guerre sera surtout culturelle et morale. Quelque soit le théâtre d’opérations, il s’agira de défendre le socle de notre identité française, nos valeurs partagées, notre culture, notre manière de vivre, et plus largement notre civilisation. Elle sera longue et difficile. La défense de la démocratie et de ce qui constitue notre patrimoine national commun va passer par un certain frein à nos libertés individuelles. L’arsenal sécuritaire, s’il est contrôlé, ne doit pas être une menace pour la démocratie.
Seule la solidarité entre Français et la confiance dans nos institutions permettront de vivre dans un climat d’insécurité, et de s’adapter au danger. La vigilance ne devra pas nous à amener à nous méfier systématiquement de l’autre dans une paranoïa destructrice de liens.
La réappropriation collective de nos symboles républicains est significative d’une réaction positive à cet environnement anxiogène.
Le courage moral doit revenir au cœur de la politique, et nos dirigeants doivent se sentir soutenus par les représentants de la société civile, mais nous tenir un discours de vérité.
Il n’y a pas de liberté sans sécurité. Mais cela ne suffira pas si notre situation économique nous rend aussi vulnérable.
Ce «pacte de sécurité» affiché actuellement ne doit pas remplacer le pacte de stabilité. Il faut également réaffirmer notre volonté de renouer avec la croissance pour des raisons économiques évidentes, mais surtout pour affirmer notre espoir dans l’avenir.
Notre pays a besoin que les Français croient de nouveau en lui, et en eux.