A longueur d’articles, sociologues et géographes, théorisent une fracture territoriale entre les territoires urbains et les territoires ruraux. Les uns s’inscriraient dans la mondialisation heureuse et seraient particulièrement dynamique tandis que les autres vivraient une période de déclin, en particulier économique. Les urbains et les ruraux ne se comprendraient plus aujourd’hui et s’opposeraient sur l’ensemble des sujets qui font notre société. Cette incompréhension et l’image négative que nous pouvons avoir collectivement des territoires ruraux aujourd’hui a été le point de départ de la réflexion engagée par l’Institut Kervégan au cours de ces derniers mois.
Espace rural, ruralité et campagne de quoi parle-t-on ?
Avant d’aborder les grands thèmes qui rythmeront les travaux de l’atelier « ruralités » dans les prochaines semaines, il nous a semblé primordial de nous attacher à en définir les contours et à poser les bases de notre réflexion. Afin de définir les espaces ruraux, nous vous proposons de partir de la définition qui en est faite par l’Insee :
« L’espace à dominante rurale, ou espace rural, regroupe l’ensemble des petites unités urbaines et communes rurales n’appartenant pas à l’espace à dominante urbaine (pôle urbains, couronnes périurbaines et communes multi polarisées). » – INSEE, définition
On voit dans cette définition le paradoxe de ce que l’on entend aujourd’hui par ruralité. A la lecture de cette dernière, nous constatons que la ruralité se définit par la négative « ce qui n’appartient pas à l’espace à dominante urbaine ».
La notion de pôle urbain prend comme critère la densité d’emploi existant sur les territoires. Si l’on se réfère au seul critère de l’emploi pour définir l’espace à dominante rurale, celui-ci n’existe pratiquement plus sur le département de Loire-Atlantique (à l’exception des franges du département) et d’Ille et Vilaine comme l’illustre la carte présentée ci-contre.
Autres critères qui ont pu être usités par l’INSEE pour définir les territoires ruraux, le nombre d’habitants (seuil de 2.000 habitants) et la notion de continuité urbaine (50% des habitants dans une unité urbaine /architecturale continue).
Au-delà de cette complexité à définir ce qu’est la ruralité, il apparait clairement que les espaces que l’on peut qualifier de ruraux selon ces définitions sont divers dans leur situation (voisinage et acceptabilité) et leur structure (taille et organisation des unités le composant…), donc par voie de conséquence dans leur géographie humaine. Nous pouvons en effet nous interroger le caractère urbain ou rural du vignoble nantais, de la région de Blain ou de la ville de Treillière. Il semble bien difficile de répondre à cette question.
C’est pour cette raison que l’atelier lancé par l’Institut Kervegan s’est appelé « ruralité(s) », car il existe sur notre département et sur l’ensemble de la région Pays de la Loire pas une forme de ruralité mais une multitude de ruralité.
Éviter de (re)tomber dans le piège de la ruralité fantasmé ?
Lorsque l’on aborde la question de la ruralité et du monde rural, il est aisé de tomber dans le cliché de ce qu’est ou a été les territoires ruraux à une époque pas si lointaine. Pour les uns, la ruralité est synonyme de solidarité, coopération, d’interconnaissance… et pour les autres de marginalisation, d’ennui. Notre atelier s’est en partie perdu sur ces questions sur les premiers mois de 2016.
Le propos de nos travaux et nos réflexions ne sera pas de tomber de nouveau dans cette approche fantasmé du charme de la campagne qui à certaines époques (années 90 et 2000) a pu pousser l’incongruité de certains jusqu’à prôner la ville à la campagne comme modèle idéal. De la même façon, il ne s’agit pas non plus de se laisser éblouir par les lumières de la ville comme seule source d’attractivité et de progrès.
Nous vivons aujourd’hui une double accélération impactant nos usages de vie quotidienne et notre rapport au territoire. Nous partons aujourd’hui du postulat que :
- Aucun territoire ne peut se vivre spatialement isolé,
- Et aucun individu n’est rattaché qu’à un seul territoire tant par ses besoins du quotidiens que pour ses pratiques virtuelles et sociales.
Trois mots clés : équilibre, complémentarité et coopération
Les questions que nous nous posons aujourd’hui dans le cadre de nos travaux sur la ruralité porte sur la forme que peut prendre l’action publique en interrogeant des acteurs locaux de communauté de communes de Loire-Atlantique sur l’équilibre et les complémentarité existant entre les territoires ruraux et la métropole de Nantes Saint-Nazaire.
Les territoires ruraux et périurbains que les membres de l’atelier ont pu rencontrer au cours de ces derniers mois sont aujourd’hui confrontés à une triple interrogation :
- Comment continuer à exister et à se développer dans un contexte de forte métropolisation et de concentration des services et des emplois dans les grandes urbaines ?
- Comment se développer de manière complémentaire avec les villes et les métropoles ?
- Comment par son action, la métropole de Nantes peut-elle participer au développement des territoires périurbains et des territoires ruraux ? Quelle place aura le pacte de réciprocité métropolitain ?