Le débat sociétal sur la fin de vie bat son plein, avec une nouvelle « convention citoyenne » qui s’est déroulée entre décembre 2022 et avril 2023.
La France fait des petits pas (depuis les lois Léonetti, la dernière en 2016) vers un assouplissement des règles d’euthanasie et de suicide assisté, toujours illégales mais qui reste bien en retard par rapport à certains de ses voisins (Suisse, Belgique, Espagne ou Canada…)
Les enjeux
Aujourd’hui tout malade atteint d’une pathologie grave et/ou incurable peut demander à ne pas subir un « acharnement thérapeutique », donc partir sous sédation (morphinique) mais à condition de le demander en toute conscience ou d’avoir rédigé ses « directives anticipées ». L’association ADMD (*) demande à aller plus loin et que soit légalisée « l’aide active à mourir », ou plus concrètement disons : le suicide assisté, qui fait intervenir un tiers (médecin, proche…). Remarquons que rien n’est précisé concernant le suicide libre, quel qu’en soit la cause.
Euthanasie
La légalisation de l’euthanasie demandée reste en débat et sera un des volets de la nouvelle loi de 2023. L’église comme une partie des soignants s’opposent à « donner la mort », privilégiant les soins palliatifs. D’autres n’osent pas aborder le sujet ou ne veulent pas enfreindre la loi. Les plus engagés veulent « aider les patients incurables, voire fatigués de vivre à partir sereinement » (ex : Admd). En effet, les soins palliatifs de fin de vie ne règlent pas le problème des insupportables souffrances physiques ou psychiques.
Si l’euthanasie devait être autorisée, elle pourrait faire l’objet d’une décision collégiale entre le corps médical et les proches comme en Belgique (notons que certains proches/accompagnants se proposent de se substituer aux soignants réticents pour « donner la mort »).
Suicide
Se suicider est un acte personnel, non condamnable par la loi (toléré par l’Eglise catholique) mais qui prend souvent un caractère de violence extrême, véritable traumatisme pour les proches.
Une « mort douce » (pilule, liquide, piqure…) voulue par l’individu lui-même, malade ou pas, au nom de sa liberté de conscience et de décision ne sera-t-elle pas préférable ? La loi l’empêche pourtant.
C’est justement le droit à ce suicide médicamenteux individuel que revendique l’association Ultime Liberté**. Elle est fondée en 1997 par deux dissidents de l’Admd*, pour qui le droit à mourir est un droit inaliénable de l’individu, relevant d’un choix libre et conscient que rien ne devrait empêcher. Ce sont tous les aspects de ce combat qui ont été abordés à Sète lors de l’AG de Ultime Liberté par la centaine d’adhérents présents. Ce fût l’occasion de débats riches et animés avec pour objectifs prioritaires de faire évoluer la loi, sans en méconnaitre les obstacles éthiques et pratiques.
Arguments développés pour un « choix libre et personnel d’interruption de vie »
- La peine de mort a été abolie en 1981 (R Badinter) et l’avortement légalisé en 1975 (S. Veil), pourquoi le suicide assisté, comme l’individuel (relevant tous deux de la liberté individuelle) ne le seraient-ils pas eux aussi ?
Les fondements de cette volonté sont basés sur la revendication d’une liberté existentielle : « je dois pouvoir sortir de ma vie quand je veux, les injonctions étatiques et/ou interdictions des religions monothéistes sont donc hors-propos ». - Disposer d’un produit léthal de « mort douce » permet de vieillir plus sereinement et d’épargner aux proches (et à la société), un jour, le traumatisme d’un suicide violent.
- De nombreux cercles de réflexions et institutions, en France comme à l’étranger, se penchent sur ce droit de liberté et de choix (Francs-maçons, Comités d’Ethique, Assemblées Nationales, Cour Constitutionnelle allemande…
Des questionnements complexes
Car COMMENT ? :
- S’assurer qu’un individu fait un choix responsable, sans pression (ou intérêt) extérieure, et que ses motivations à mourir sont acceptables et solides ?
- Encadrer la mise à disposition d’un produit léthal (conditions, procédures.) sans détournement d’usage (stockage produit chez médecin, auditions et entretiens) ?
- Déterminer un âge minimum d’accès au suicide : majorité légale ou maturité plus tardive ? (en Belgique, les malades incurables mineurs sont éligibles au suicide assisté)
Conclusion
Les volets éthiques, pratiques et légaux d’une fin de vie volontaire, assistée ou non, demeurent complexes et ne connaitront probablement, en France, que des progrès mineurs.
Par Michel Aymé, adhérent IK