Par Thierry PATRICE
Le moyen-âge est fascinant, plein de riens qui forment un tout, un simple trait, et Jacques Le Goff, merveilleux conteur, est un grand spécialiste de cette période. Autant dire que la relecture de «la civilisation de l’occident médiéval » a été un grand moment de délectation.
En ce temps là la culture était obscure, les grecs et leurs fils romains passés aux oubliettes. Non qu’il n’y ait eu de création, mais son abondance était entièrement tournée vers le ciel, seul remède à l’impuissance face aux violences cumulées des hommes et de la nature. L’homme était livré à son animalité sans le fard social et sans l’éducation qui dissipent les peurs, mais, plus proche à la différence du temps des cavernes, il a laissé des traces.
En ce temps là on partait en croisade en espérant que délivrer Jérusalem libérerait de la violence de l’intérieur. On exportait surtout la vérole et on importait la peste.
En ce temps là on allait négocier la reconnaissance du Pape, représentant de dieu parmi les hommes pour légitimer le pouvoir violent et sans partage.
En ce temps là les pauvres n’avaient d’autre choix que se rebeller pour tout et pour rien afin de desserrer l’étau de la misère.
En ce temps là c’est l’artisan ou le marchand de la ville recréée qui faisait le contre pouvoir en échappant financièrement et géographiquement à l’emprise du seigneur qui ne régnait bientôt plus que sur ses plaisirs et sur les murs de son château. C’est la ville ponctuelle dans un univers rural qui représentait l’avenir.
En ce temps là une modeste innovation technique, simple redécouverte ou produit d’importation, créait richesse et pouvoir qu’il fallait défendre. Les croyances étaient autant répandues que le savoir gardé secret.
Ce temps là, malgré sa vacuité, malgré les souffrances des peuples a pourtant permis la séparation de l’église et de l’état et jeté pour 5 siècles les bases d’un système de gouvernance familial qui n’a accouché qu’au 20ème siècle d’un monde nouveau par le cataclysme des guerres. Le Moyen-âge a été une étape décisive dans la lente émancipation de l’homme vis-à vis de la gouvernance.
Toute ressemblance de notre temps avec le moyen-âge serait purement fortuite et un rapprochement éventuel n’engagerait que le hasard des mots.